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Alice Delanghe, avec sa série de photographies Une Journée à Fos-sur-mer, exposée et produite par Travaux Publics pendant l’été 2021 nous propose sa vision de sa découverte du paysage de Fos.

 

      En janvier de cette même année, Alice Delanghe, artiste photographe, se rend à Fos-sur-mer en compagnie de la journaliste Clara Hellner qui prépare un article sur les luttes des habitants concernant la situation sanitaire de la commune pour un journal allemand. Fos-sur-mer est une petite ville portuaire de 15 000 habitants dans la métropole d’Aix-Marseille. Elle est connue pour l’industrie métallurgique et pétrochimique qui colonise ses côtes. L’air y est l’un des plus pollués de France, les cancers et les maladies cardio-vasculaires y sont deux fois plus courants qu’ailleurs.

 

    Les deux jeunes femmes ont traversé les paysages de Fos-sur-mer à pied et en voiture. Ils se sont montrés figés, établis, immuables. Dans cette série, usines, espaces verts, habitations et ciels nuageux composent les paysages. Cette fenêtre sur Fos prend un ton apocalyptique, exempt de toute présence humaine, il ne reste que les animaux, ou la trace de leur passage. C’est comme si l’humain n’assumait plus ses déraisonnements. Les âmes condamnées hantent les habitations et restent invisibles à nos yeux à l’instar de leurs luttes. Clara dressée entre les silos bleus et blancs, comme défiant de site industriel, nous rappelle le motif de cette visite. Tandis qu’elle fait un état des lieux de la crise sociale et sanitaire, Alice capture l’esthétique symptomatique de ce territoire.

 

      Depuis la plage déserte ou la route, Alice rend explicite l’omniprésence de l’industrie dans le paysage de Fos. Le ciel de plomb dramatise les scènes. Le jeu pour enfants en forme de bateau, symbole d’un temps libre délaissé à d’autres profits, s’oppose à la machinerie des cargos en marche perpétuelle à l’arrière-plan. Une perspective d’avenir professionnel? Il est évident que la zone industrielle crée de l’emploi et fait tourner l’économie de la ville. Plus loin, l’observatoire de secours vide de la même plage dresse un constat vain de la situation globale de la ville.

Les photos d’Alice nous déstabilisent par leur sérénité menaçante. Ce romantisme post-moderne cache la réalité d’une beauté empoisonnée et corrompue.

Olivia Fert, curatrice et co-fondatrice de Travaux Publics, 2021

 

 

Dossier de l'exposition : 

Alice Delanghe, with her series of photographs Une Journée à Fos-sur-mer, exhibited and produced by Travaux Publics during the summer of 2021, offers us her vision of her discovery of the Fos landscape.

 

      In January of the same year, Alice Delanghe, artist photographer, went to Fos-sur-mer in the company of the journalist Clara Hellner who was preparing an article on the struggles of the inhabitants concerning the sanitary situation of the commune for a German newspaper. Fos-sur-mer is a small port town of 15,000 inhabitants in the metropolis of Aix-Marseille. It is known for the metallurgical and petrochemical industry that colonises its shores. The air is one of the most polluted in France, and cancers and cardiovascular diseases are twice as common there as elsewhere.

 

    The two young women crossed the landscape of Fos-sur-Mer on foot and by car. They showed themselves to be fixed, established, unchanging. In this series, factories, green spaces, houses and cloudy skies make up the landscape. This window on Fos takes on an apocalyptic tone, free of any human presence, only the animals remain, or the trace of their passage. It is as if humans no longer assume their folly. The condemned souls haunt the dwellings and remain invisible to our eyes, just like their struggles. Clara, standing between the blue and white silos, as if defying the industrial site, reminds us of the reason for this visit. While she takes stock of the social and health crisis, Alice captures the aesthetics symptomatic of this territory.

 

      From the deserted beach or the road, Alice makes explicit the omnipresence of industry in the Fos landscape. The leaden sky dramatises the scenes. The children's playground in the shape of a boat, a symbol of free time abandoned to other profits, contrasts with the machinery of the cargo ships in perpetual motion in the background. A professional future? It is obvious that the industrial zone creates jobs and keeps the city's economy going. Further on, the empty emergency observatory on the same beach makes a vain statement about the city's overall situation.

Alice's photos unsettle us with their threatening serenity. This post-modern romanticism hides the reality of a poisoned and corrupted beauty.

 

Olivia Fert, curator and co-founder of Travaux Publics, 2021

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PROJET / BEFORE SUNRISE – DEPUIS L’EUROPE JUSQU’AU JAPON

Une proposition de Constance Hinfray, Alice Delanghe, Aurélien Lepetit, Eri Yagi, Megumi Tsuga, Chika Matsuda, Ayaka Ura, Yukie Hirokawa, Haruka Saito, Akiko Nagashima, Yo Yasuda, Yuko Fukasawa, Tomsuma.

     Accueillies pendant deux mois et demi en résidence d’été à la Galerie Quinconce de Montfort-sur-Meu, les artistes Alice Delanghe et Constance Hinfray développent Before Sunrise, un projet de collaboration entre une vingtaine d’artistes françaises et japonaises.


     Before Sunrise est avant tout une histoire de rencontres : celles que Constance Hinfray a déclenché avec une communauté d’artistes lors d’un séjour au japon en 2019, celle entre les deux artistes malouines qui entament une collaboration, et au centre du projet, la rencontre entre des femmes artistes et professionnelles de l’art originaires de plusieurs pays. Cette mise en relation et cette expérience d’une ouverture à l’autre prend alors forme par une correspondance entre plusieurs pratiques artistiques et différentes cultures. Ces nombreuses collaborations révèlent l’importance accordée à la place de l’autre pour une coopération effective de diverses formes d’expression, un partage qui répartit le commun. 

     A l’origine du projet, de nombreuses discussions entre des femmes artistes en France et au Japon lors de réunions autour de la place des femmes dans le milieu de l’art. En découlent des conclusions communes, des témoignages sensiblement familiers. Le milieu compétitif de l’art, le manque de solidarité, la pression que subissent les artistes et plus particulièrement les femmes sont révélés.
Les artistes souhaitent alors créer un spectacle de marionnettes permettant de fournir des témoignages des problématiques rencontrées par les femmes artistes dans leurs vies et leurs carrières. Inspiré du Bunraku, un type de théâtre japonais datant du XVIIe siècle avec des marionnettes à taille humaine manipulées à vue, le spectacle raconte les expériences de sept jeunes femmes artistes, en Europe et au Japon. Ces marionnettes, conçues par les artistes et par la couturière Claire Doucet, permettront de sensibiliser les jeunes publics à l’utilisation du langage corporel et verbal et aux violences et stéréotypes pouvant se jouer dès le plus jeune âge. Adossé au spectacle et au programme pédagogique, un film documentaire est réalisé par Alice Delanghe pour rendre compte du cheminement et des différentes rencontres organisées.
Dans toutes les implications du projet, une démarche écologique globale qui réutilise des matériaux de récupération, biodégradables. Les marionnettes sont réalisées en plusieurs morceaux, pouvant être vidées de leur mousse pour faciliter le transport et permettant de les réutiliser, de les réassembler pour créer de nouvelles marionnettes.

    Avec la crise de la COVID-19, le confinement et la fermeture des frontières qu’elle engendre, les projets de voyage d’Alice Delanghe et Constance Hinfray sont compromis, obligeant à repenser le projet. Et c’est ce qui fait la force de Before Sunrise, un projet laissant place au hasard et aux impondérables qui finissent par nourrir le projet lui-même. Elles parviennent alors à travailler à distance avec les artistes japonaises sur la production du spectacle et des marionnettes et profitent de ce « temps-mort » pour ralentir et se concentrer sur l’essentiel. La production du spectacle, l’objectif final, est alors mis au second plan pour privilégier le système d’entraide d’une communauté internationale d’artistes et d’une véritable sororité qu’elles souhaitent mettre en place. Il s’agit de créer, grâce à un fonctionnement horizontal et organique, une communauté de travail qui compose avec le vivant, comme une alternative à l’institution. Elles profitent de l’invitation en résidence de la Galerie Quinconce à Montfort-sur-Meu pour mettre en lumière la scène locale. Elles mettent en place des discussions au long cours avec des professionnelles de l’art autour de l’écologie dans l’art, telles que l’artiste Ariane Michel, la directrice générale des écoles supérieures d’art de Bretagne Danièle Yvergniaux, ou encore avec Muriel Montserrat, Présidente du Festival de théâtre lycéens sur les planches. Pour sensibiliser et fédérer autour de leur projet, elles organisent également plusieurs évènements à Montfort-sur-Meu en commençant par une «table ronde femmes artistes» à la Galerie Quinconce le 16 août, un temps d’échanges entre artistes avec l’intervention de Megumi Tsuga et Ayaka Ura à propos des Female Artists Meetings. Pour poursuivre la multiplication des points de vue et l’instauration d’un rapport de confiance entre artistes, elles organisent également une table ronde sur le concept de naturphilosophie qui guide les artistes du collectif et le 22 août une journée des femmes réalisatrices avec la projection au Cinéma La Cane de plusieurs vidéos d’artistes femmes issues du tissu local : Carole Cicciu, Angèle Manuali, Margaux Parrillaud et Frederrikke Fischer Christensen, Manon Riet, Alisson Schmitt, ainsi que des vidéos d’Alice Delanghe. Pour clore ce week-end de rassemblement et leur résidence d’été, un grand carnaval déjanté s’est tenu le dimanche 23 août devant la galerie avec l’invitation des deux musiciennes rennaises Maison Carton.

 

     Ouvert à l’impermanence des choses, toujours flexible, Before Sunrise suit son cours. En attendant de pouvoir rejoindre les artistes japonaises pour la tournée du spectacle, Alice Delanghe et Constance Hinfray sont accueillies en résidence de travail du 31 août au 13 septembre à la Générale à Paris et voyageront plus localement à Amsterdam et Bruxelles pour poursuivre leurs recherches et la constitution de leur communauté : « Dans un voyage ce n’est pas la destination qui compte mais toujours le chemin parcouru, et les détours surtout1.». 

1 Philippe Pollet-Villard, Mondial nomade, Paris, Flammarion, 2011. 

Doriane Spiteri, commissaire d'exposition et critique d'art, 2020

plus d'infos sur beforesunrise.org et sur point contemporain

PROJECT / BEFORE SUNRISE - FROM EUROPE TO JAPAN

A proposal by Constance Hinfray, Alice Delanghe, Aurélien Lepetit, Eri Yagi, Megumi Tsuga, Chika Matsuda, Ayaka Ura, Yukie Hirokawa, Haruka Saito, Akiko Nagashima, Yo Yasuda, Yuko Fukasawa, Tomsuma.

 

     Hosted for two and a half months in a summer residency at the Galerie Quinconce in Montfort-sur-Meu, Brittany, France, the artists Alice Delanghe and Constance Hinfray are developing Before Sunrise, a collaborative project between some twenty French and Japanese artists.


     Before Sunrise is above all a story of encounters: those that Constance Hinfray triggered with a community of artists during a stay in Japan in 2019, those between the two artists from Saint Malo who are starting a collaboration, and at the centre of the project, the meeting between women artists and art professionals from several countries. This connection and experience of openness to the other takes shape through a correspondence between several artistic practices and different cultures. These numerous collaborations reveal the importance given to the place of the other for an effective cooperation of various forms of expression, a sharing that distributes the common. 

 

     The project originated from numerous discussions between women artists in France and Japan during meetings about the place of women in the art world. Common conclusions were reached, and the testimonies are quite familiar. The competitive environment of the art world, the lack of solidarity, the pressure that artists, and especially women, are subjected to are revealed.
The artists wanted to create a puppet show that would provide evidence of the problems faced by women artists in their lives and careers. Inspired by Bunraku, a type of Japanese theatre dating from the 17th century with human-sized puppets manipulated by sight, the show tells the stories of seven young women artists in Europe and Japan. These puppets, designed by the artists and the seamstress Claire Doucet, will help to raise awareness among young audiences about the use of body and verbal language and about the violence and stereotypes that can be played out from an early age. In addition to the show and the educational programme, a documentary film is being made by Alice Delanghe to document the process and the various meetings organised.
In all the implications of the project, a global ecological approach that reuses recycled, biodegradable materials. The puppets are made in several pieces, which can be emptied of their foam to facilitate transport and allow them to be reused and reassembled to create new puppets.

   With the COVID-19 crisis, the confinement and the closing of the borders that it engenders, Alice Delanghe and Constance Hinfray's travel plans are compromised, forcing them to rethink the project. And this is the strength of Before Sunrise, a project that leaves room for chance and imponderables that end up feeding the project itself. They manage to work at a distance with the Japanese artists on the production of the show and the puppets and take advantage of this "time-out" to slow down and concentrate on the essential. The production of the show, the final objective, is then put on the back burner to privilege the mutual aid system of an international community of artists and a true sisterhood that they wish to set up. It is a question of creating, thanks to a horizontal and organic functioning, a working community that composes with the living, as an alternative to the institution. They take advantage of the invitation to residency at the Galerie Quinconce in Montfort-sur-Meu to highlight the local scene. They set up long-term discussions with art professionals on the subject of ecology in art, such as the artist Ariane Michel, the director general of the Brittany Art Schools Danièle Yvergniaux, or Muriel Montserrat, President of the High School Theatre Festival. To raise awareness and unite people around their project, they are also organising several events in Montfort-sur-Meu, starting with a "women artists' round table" at the Galerie Quinconce on 16 August, a time of exchange between artists with the intervention of Megumi Tsuga and Ayaka Ura about the Female Artists Meetings. In order to pursue the multiplication of points of view and the establishment of a relationship of trust between artists, they are also organising a round table on the concept of naturphilosophy which guides the artists of the collective and on the 22nd of August, a day of women filmmakers with the screening at the Cinéma La Cane of several videos by women artists from the local scene: Carole Cicciu, Angèle Manuali, Margaux Parrillaud and Frederrikke Fischer Christensen, Manon Riet, Alisson Schmitt, as well as videos by Alice Delanghe. To close this weekend of gathering and their summer residency, a big crazy carnival was held on Sunday 23 August in front of the gallery with the invitation of the two Rennes musicians Maison Carton.

 

     Open to the impermanence of things, always flexible, Before Sunrise follows its course. While waiting to join the Japanese artists for the tour of the show, Alice Delanghe and Constance Hinfray are hosted in a working residency from August 31 to September 13 at La Générale in Paris and will travel more locally to Amsterdam and Brussels to continue their research and the constitution of their community: "In a journey, it is not the destination that counts, but always the path taken, and the detours above all1

 

1 Philippe Pollet-Villard, Mondial nomade, Paris, Flammarion, 2011. 

 

Doriane Spiteri, curator and art critic, 2020

 

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